Je ne fume pas, je ne bois pas et je faisais du sport...
Pourtant, je ne suis plus en phase avec mon corps. Je me sens désynchronisée comme la manette d'un jeu vidéo, avec en plus, ma jauge d'énergie qui fluctue anarchiquement à tout moment de la journée...
Je n’aurais jamais imaginé avoir besoin de témoigner un jour ! Avoir besoin de décrire l’épreuve que je traverse depuis bientôt sept mois…
Parce que je sais que beaucoup souffrent depuis plus longtemps que moi et certains plus que moi... Et puis, on se dit que ça va passer... Mais ça ne passe pas et lire des témoignages me fait du bien. Je m'y reconnais et je me sens moins seule... Personne autour de moi n'a ces symptômes persistants...
Je me dis que ceux qui ne vivent pas ce que je vis peuvent écouter et ça fait du bien mais ils ne peuvent pas comprendre... Encore moins ceux qui ont traversé la Covid 19 sans symptômes durables... Pour eux, c'est du passé ! C'est bon maintenant !!! Il faut reprendre une vie normale ! Finalement ce n'était pas grand chose... En plus, chacun y va de ses conseils : tu devrais faire ci, tu devrais faire ça...
Mais je viens de prendre conscience, qu’écrire, témoigner, partager mon vécu m'aidera à accepter ce que je n'arrive pas à accepter : « pourquoi moi et pourquoi si difficile? »
Et peut-être qu'à défaut de m'aider, ça aidera d’autres personnes...
Février-Mars 2020, on commence à sérieusement entendre parler de la covid-19 qui trouve son origine en Chine… Et je comprends immédiatement que c’est important. Sans doute grave. La Chine est plutôt secrète et là, elle prévient la monde entier, c'est dire…
Je me protège : aération/ventilation au maximum du possible, gel hydroalcoolique, masques (quand c'est possible), huiles essentielles, gants et blouse au travail, drive, nettoyage des courses à la lingette, stockage dans un réfrigérateur intermédiaire, vêtements lavés et désinfectés, douche en fin de journée, plus aucun bisou à mes enfants... Ça c'était dur !!!
Et le 23 octobre 2020 après-midi... Ce sont les vacances de la Toussaint et je vais aller marcher avec une amie. Je me réjouis de la voir à chaque fois… Mais quelques heures avant notre rendez-vous, je somnole assez profondément et je me dis que je reporterais bien ma sortie, mais j’y vais quand même, ça me fait du bien…
Le 24 octobre : fatigue terrassante. Je fais une téléconsultation avec un médecin qui ne me connait pas et qui me fait faire un test PCR. Je le fais. Il est très invasif et se révèle positif.
IMPOSSIBLE A MES YEUX !!! Je me protège tellement...
L'ARS m'appelle pour m'expliquer l'isolement... Je m'isole trois semaines. Oui, trois... par choix et aussi par fatigue...
J'ai dormi 2 semaines 20 heures sur 24. Je ne me réveillais que pour les repas, car bizarrement, j'ai toujours gardé l'appétit.
La 3ème semaine, j'ai commencé à avoir la sensation d'avoir « une bête » dans le cerveau. « Un ver ou un asticot » qui se déplaçait derrière le front, dans l'os du nez, derrière les yeux, jusqu'au fond de l'oreille. C'était horrible à vivre !
Premier médecin : perplexe.
Je suis allée aux urgences, le médecin m'a crue. J'en ai pleuré ! Et j'ai pu rapidement rencontrer un premier ORL qui a découvert un kyste nasal et une irritation vive dans toute la narine gauche. Puis j'ai consulté un deuxième ORL, quelques semaines après, car ça continuait... Et après un scanner, on m'a diagnostiqué une sinusite sphénoïdale. C'est rare, il paraît...
En tout cas, c'était très très douloureux, épuisant et très difficile à soigner.
Il m'aura fallu 5 mois pour sentir du mieux : corticoïdes, antibiotiques, séances d’ostéopathie...
Aujourd'hui, ma narine gauche est comme agrandie. Elle n'est plus comme avant. Un 3ème ORL m'a recommandé de chercher des témoignages sur internet pour m'aider... En vain...
Aujourd'hui, j'ai encore beaucoup d'autres symptômes : des problèmes de mémoire (les prénoms, les noms, les demandes que je viens de faire à mes enfants...), des problèmes d'élocution, de bégaiement, de confusion... Je n'arrive pas à m'expliquer clairement, je cherche mes mots plusieurs secondes avant de les trouver...
J'ai des acouphènes, le soir, principalement, au moment du coucher : ça craque ou ça siffle, pour mon oreille, alors que mon conjoint n'entend rien. Ça me réveille aussi en pleine nuit...
Je n'ai pas récupéré l'odorat : un jour, le repas brûlait sur le gaz sans que je m 'en rende compte. Je perçois des odeurs fantômes de fumée de cigarette ou de parfum. Les odeurs du quotidien sont parfois déformées : mon déodorant préféré sent un gaz nauséabond indéfinissable.
J'étais pourtant capable, avant octobre dernier, de dire quel parfum portait telle ou telle personne dans la rue. J'essaie de me rééduquer avec des huiles essentielles...
Je n'ai pas récupéré le goût non plus : je goûte un thé vert-fruits rouges pour un thé à la vanille. Il arrive que j'ai un goût métallique dans la bouche. Je dois parfois demander à mon entourage de goûter ce que je mange car le goût ressenti par mon cerveau est déformé et parfois ça me semble pas bon.
Je mange des aliments sans pouvoir les définir : est-ce que je mange du poisson, du poulet ou du fromage ? Je ne sais pas... C'est pénible. Pour résumer, c'est comme s'il existe une multitude de filtres qui séparent le « ressenti de mon cerveau » et les sens de « ma bouche et de mon nez. »
Le haut de mes poumons me brûle encore... Le plus souvent le soir.
J'ai aussi des essoufflements en faisant la vaisselle, en voulant ramasser quelque chose à terre, en marchant plus vite sur une très courte distance... Ce qui provoque des palpitations pendant quelques minutes.
Les symptômes les plus terribles sont la fatigue et les douleurs articulaires. Elles sont parfois si puissantes... En février, j'ai dû être arrêtée 5 semaines. J'étais épuisée. Les trois semaines d'octobre-novembre n'avaient pas suffi. C'est mon entourage professionnel qui m'a recommandé d'aller consulter mon médecin de famille cette fois-ci ! Je devais me reposer. Je n'étais plus qu'à 10% de mes forces... Et j'ai dormi, dormi, dormi... Encore aujourd'hui, je dois dormir 10 heures par nuit pour pouvoir assurer, à peu près correctement, ma journée de travail...
Mais la fatigue me prend souvent et par surprise : soit le matin ou l'après-midi ou encore toute une journée...
J'ai des douleurs articulaires ponctuelles aux coudes et aux chevilles mais c'est principalement au niveau des genoux que je souffre le plus : sous forme de poussées sur plusieurs jours. Je ne peux même pas toucher mes rotules pour les masser. C'est comme si elles étaient pleine d'hématomes. Ça tire. Je marche comme une personne âgée. C'est déroutant, moi qui faisais trois fois une heure de marche rapide par semaine... Aujourd'hui, plus aucun sport...
Je perds énormément mes cheveux. La coiffeuse les a même trouvés « poisseux »... J'ai parfois des éruptions cutanées qui démangent très fort.
La semaine dernière, j'ai vu un neurologue qui se veut rassurant au vu de mon scanner cérébral mais qui ne peut rien pour moi (j'étais son 1er Covid long). Il m'envoie voir un neuropsychologue pour des tests de mémoire... Je vois un cardiologue dans un mois et sans doute, faudra t-il aussi voir quelqu'un pour ces douleurs articulaires...
Je n'ai jamais consulté autant de médecins, de spécialistes, d’ostéopathes, fait autant de scanners, d'IRM... qu'en ces sept derniers mois... Mon corps perdu ???